Associations : quand la rémunération des dirigeants impose l’affiliation à la sécurité sociale

La question de la rémunération des dirigeants d’association n’est pas nouvelle, mais elle revient sur le devant de la scène en 2025, à la lumière d’une décision importante rendue par la Cour d’appel de Toulouse le 15 mai dernier (n° 23/01909). Celle-ci rappelle avec fermeté que lorsqu’un dirigeant d’association est rémunéré, il doit impérativement être affilié à la sécurité sociale, même si cette rémunération est modeste, irrégulière, ou justifiée par des fonctions bénévoles en parallèle. Cette décision renforce une position déjà exprimée par l’URSSAF et les juridictions sociales : dès lors qu’un lien de subordination existe, même informel, et que le dirigeant perçoit une rétribution, l’affiliation au régime général devient obligatoire. Pour les associations, cela peut avoir des conséquences importantes, notamment en cas de redressement.

Quelle est la portée de cette jurisprudence ?

Le cas jugé à Toulouse concernait une association ayant conclu une convention de prestation avec son président pour des missions spécifiques (animation, gestion de projets). Si ce dernier ne disposait pas de contrat de travail formel, la Cour a tout de même retenu que la rémunération régulière, le contrôle des missions par le conseil d’administration et la nature des tâches effectuées caractérisaient un lien de subordination.

En d'autres termes, l’association ne pouvait pas s’exonérer de l’affiliation à la sécurité sociale en prétextant l’absence de contrat ou en invoquant le caractère “occasionnel” des paiements. Dès qu’un dirigeant est rémunéré pour des activités liées aux fonctions de l’association, la cotisation sociale devient incontournable.

Ce rappel jurisprudentiel est donc une alerte pour les structures associatives, surtout les plus petites, qui pourraient croire à tort que les contraintes sociales ne s’appliquent qu’aux grandes organisations ou aux salariés “classiques”.

Rémunération ou remboursement de frais des dirigeants d’association : attention à ne pas confondre !

Toutes les sommes versées aux dirigeants ne sont pas nécessairement considérées comme de la rémunération. Les remboursements de frais (sur justificatifs) ou les indemnités forfaitaires dans la limite des barèmes fiscaux sont exclus de l’assiette de cotisations sociales… à condition de respecter les règles.

Le piège réside dans les avantages déguisés : lorsqu’un remboursement devient forfaitaire sans lien avec des dépenses réelles, ou lorsqu’un dirigeant perçoit une somme sous forme de défraiement pour des tâches relevant d’un emploi salarié, l’URSSAF peut requalifier ces sommes en salaire. Et les conséquences peuvent être lourdes : cotisations sociales à rattraper, pénalités, voire redressements sur plusieurs années.

Pour sécuriser votre fonctionnement, il est donc recommandé de tenir une comptabilité précise, de formaliser les remboursements, et de consulter un expert si vous envisagez une rémunération des dirigeants.

Des implications pour le statut de l'association

Cette décision de la Cour d’appel de Toulouse du 15 mai 2025 soulève aussi une question de fond : celle du modèle économique des associations, parfois tiraillées entre les obligations juridiques du monde du travail et leur fonctionnement bénévole, souple, souvent informel.

Pourtant, les responsabilités pesant sur les dirigeants sont réelles. Nombre d'entre eux s'investissent à plein temps, parfois avec des compétences proches de celles du secteur privé. Offrir une juste reconnaissance financière n’a rien de choquant. Encore faut-il le faire dans les règles.

À ce titre, un compte pro en ligne association peut faciliter la gestion des flux financiers, la séparation des dépenses personnelles et professionnelles, et la traçabilité des versements aux dirigeants.

Ce que doivent retenir les associations

  • Dès qu’un dirigeant est rémunéré, même partiellement, l’affiliation à la sécurité sociale est obligatoire.
  • Le lien de subordination peut être retenu sans contrat écrit : c’est la réalité des faits qui compte.
  • Les remboursements de frais ne sont pas concernés s’ils sont justifiés et correctement encadrés.
  • La formalisation des relations entre l’association et ses dirigeants est vivement recommandée : conventions, rapports d’activité, procès-verbaux d’assemblée…
  • En cas de doute, mieux vaut anticiper et se faire accompagner plutôt que subir un redressement URSSAF.

Une obligation qui s’inscrit dans une logique de transparence

Ce renforcement des obligations sociales n’a pas vocation à pénaliser les associations. Il vise plutôt à garantir l’équité entre tous les travailleurs, à éviter les abus, et à valoriser les fonctions de direction dans le respect du droit social.

Pour les dirigeants d’association, c’est aussi une forme de protection : en étant affiliés, ils bénéficient d’une couverture sociale, de droits à la retraite, à la maladie, et peuvent même accéder à des droits au chômage dans certaines conditions.

La loi 1901 ne s’oppose en rien à la rémunération d’un président ou d’un membre du bureau. Elle impose simplement la transparence (via les statuts et les assemblées générales) et le respect des plafonds fiscaux si l’association souhaite conserver ses avantages (notamment la possibilité de délivrer des reçus fiscaux).

La rémunération des dirigeants dans les associations peut être un levier de professionnalisation, à condition d’être encadrée et déclarée. L’affiliation obligatoire à la sécurité sociale en est une étape clé. En sécurisant vos pratiques dès maintenant, vous protégez à la fois votre structure et ceux qui la font vivre au quotidien.