Environnement : les investissements non durables des banques centrales

D’après un récent rapport de l’ONG Reclaim Finance, les banques centrales ne donnent pas l’exemple en matière de lutte contre le dérèglement climatique. Un quart seulement des banques centrales de l’Eurosystème et du G20 ont adopté une politique d’investissement socialement responsable. Le rapport expose les investissements non durables des banques centrales et souligne tout de même les efforts fournis par la Banque de France.

Banques centrales : une absence d’engagement environnemental ou un manque de transparence

Alors même que les banques centrales imposent des règles aux acteurs financiers privés pour qu’ils réduisent leur impact environnemental, ces institutions sont loin d’être véritablement en position de donner des leçons, comme le démontre le rapport « Les investissements non durables des banques centrales exposés » de l’ONG Reclaim Finance.

Selon l’ONG, les banques centrales du G20 et de l’Eurosystème (à savoir la Banque centrale européenne et les banques centrales des pays de la zone euro) se soucient peu de l’impact environnemental de leurs investissements.

« Il s’agit d’un flagrant délit de “faites ce que je dis, pas ce que je fais”, car celles-ci avertissent des dangers des effets du changement climatique sur le système financier et appellent les institutions financières privées à en tenir compte », déclare Reclaim Finance.

Sur les 14 banques centrales qui se sont engagées à réaliser des investissements durables et responsables, soit un quart seulement des institutions concernées, 9 d’entre elles (dont la Banque centrale européenne) ont un fonctionnement très opaque en ce qui concerne leur politique d’investissement. Parmi ces 9 banques centrales, 6 ne communiquent aucune information susceptible de prouver la véracité de leurs déclarations.

Par ailleurs, 8 banques centrales de l’Eurosystème, notamment la Banque de Lituanie, la Banque de Grèce et la Banque de Slovaquie, n’ont adopté aucune politique d’investissement socialement responsable.

 

Des efforts importants fournis par la Banque de France

La Banque de France fait figure de bonne élève, « en visant à aligner les portefeuilles sur une trajectoire de 1,5 °C, en s’opposant au développement des énergies fossiles et en limitant le soutien aux grands pollueurs ».

La Banque de France n’est pas la seule à appliquer des restrictions concernant le soutien aux projets de développement d’énergie fossile. La Slovénie, l’Allemagne et la Suisse le font également, mais « ces restrictions sont particulièrement imparfaites et limitées », à l’exception de la France.

Toutefois, si la Banque de France se démarque des autres banques centrales du G20 et de l’Eurosystème, elle a encore des efforts à fournir pour que ses investissements soient alignés sur l’objectif de réchauffement climatique limité à 1,5 °C, fixé par l’Accord de Paris.

Le rapport de Reclaim Finance souligne également les efforts de la Banque de Finlande, qui s’est engagée en faveur de la neutralité carbone. Mais en l’absence d’objectifs concernant les émissions de gaz à effet de serre et de critères encadrant les investissements dans les énergies fossiles, l’engagement effectif de la Banque de Finlande demeure incertain.

D’après Reclaim Finance, les banques centrales ont recours à « cinq astuces pour passer pour des investisseurs responsables tout en continuant à investir dans les grands pollueurs » :

  1. Elles manquent volontairement de transparence ;
  2. Elles font valoir les principes de l’investissement responsable ;
  3. Elles s’alignent sur des normes internationales peu exigeantes ;
  4. Elles investissent dans des obligations vertes ;
  5. Elles sélectionnent les entreprises qui affichent les plus fortes convictions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG), ce qu’on appelle l’approche Best-in-Class.

Selon l’ONG, la Banque centrale européenne a même refusé de lui fournir les éléments demandés quant à sa politique d’investissement socialement responsable.

Pour conclure, le rapport de Reclaim Finance demande aux banques centrales de s’aligner sur l’objectif de réchauffement limité à 1,5 °C, et de « sortir des énergies fossiles d’ici 2050 ». Sont aussi exigées une politique de sortie du charbon, la fin des investissements dans de nouveaux projets de production d’énergies fossiles, et « une politique concernant le pétrole et le gaz non conventionnels ».