Entreprise individuelle : ce que change la séparation des patrimoines

L’élément essentiel de la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante réside dans l’instauration d’un patrimoine professionnel séparé du patrimoine personnel de l’entrepreneur. Ce nouveau statut devrait limiter l’intérêt du régime de l’EIRL (entreprise individuelle à responsabilité limitée).

Plus de 3 millions de travailleurs indépendants concernés

Plus de 3 millions de personnes en France travaillent sous le statut d’indépendant, un terme juridique qui regroupe à la fois les artisans, les commerçants, les entrepreneurs agricoles, les professions libérales et les micro-entrepreneurs. Tous ces acteurs ont fait le choix de ne pas s’organiser en société avec comme principal objectif d’éviter d’avoir à accomplir certaines démarches administratives. Ce statut présente néanmoins un inconvénient majeur pour les travailleurs qui restent responsables des dettes contractées par la société sur leur patrimoine personnel (sauf dans le cas de l’EIRL).

La loi en faveur de l’activité professionnelle indépendante instaure un statut plus protecteur pour le patrimoine personnel des entrepreneurs. À partir du 15 mai 2022, leur responsabilité sera limitée par principe à leur patrimoine professionnel.

Une définition plus complexe du patrimoine personnel

Pour mieux comprendre la frontière établie entre les deux patrimoines, il faut rappeler qu’avant la création du statut unique, la résidence principale de l’entrepreneur individuel pouvait être protégée d’une éventuelle saisie de la part des créanciers en faisant une déclaration d’insaisissabilité. Désormais, la loi prévoit que les banques ne pourront plus saisir le patrimoine personnel du travailleur, qu’il s’agisse de biens immobiliers ou mobiliers, de titres détenus sur un compte patrimonial ou d’argent placé sur un compte bancaire personnel. Seule exception : l’usage professionnel de ces biens personnels.

La loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante pose deux cas particuliers. Le texte précise d’abord que les dettes fiscales et sociales relèvent du patrimoine professionnel sauf en cas de fraude fiscale ou de non-paiement des charges sociales. Dans cette situation, le fisc pourra saisir l’ensemble des biens de l’entrepreneur pour couvrir le paiement de l’impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux et la taxe foncière. Ensuite, l’entrepreneur peut renoncer à protéger sa résidence principale et ses biens personnels lors de la souscription d’un emprunt bancaire ou par acte notarié. Ce peut être le cas s’il souhaite apporter plus de garanties aux banques afin d’obtenir une somme plus importante.

Les anciennes créances ne sont pas concernées

La réforme du statut unique des entreprises individuelles s’appliquera à toutes les nouvelles entreprises. En revanche, pour les structures déjà créées, la séparation du patrimoine personnel et professionnel ne sera effective qu’à partir du 15 mai 2022. Autrement dit, rien ne change pour les créances en cours. Cela signifie que les anciens créanciers pourront toujours saisir les biens personnels de l’entrepreneur individuel pour couvrir une ou plusieurs dettes.

Ainsi, la création de ce statut unique et la séparation des patrimoines constituent une véritable protection pour l’entrepreneur face aux risques liés à son activité.